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Day & Night : Modern Flute & Piano Duos by Women Composers

Dernière mise à jour : 19 août 2021

Août 2020

Nocturne – Lili Boulanger

Pastorale, Forlane – Germaine Tailleferre

Sonate pour flûte et piano (Andantino con moto, Scherzo-Vivace, Adagio, Finale-Moderato) – Mel Bonis Sonate pour flûte et piano (Con spirito, Lento, Presto) – Lita Grier

Atacama (Capricho, Nocturno, Volante) – Nancy Galbraith

Erin K. Murphy (flûte) et Kirstin Ihde (piano)



Comme en écho au disque conçu par Juliette Hurel et Hélène Couvert pour Alpha [voir notre compte-rendu], l’album des Américaines Erin K. Murphy et Kirstin Ihde nous fait entrer dans l’univers de compositrices nées des deux côtés de l’Atlantique grâce au Nocturne, ici pour flûte et piano, de Lili Boulanger (1893-1918). De l’atmosphère à la fois paisible et intime du début, rythmé par les tranquilles accords du piano, la flûte nous transporte progressivement vers l’agitation du lever du jour, puis nous replonge dans le calme de la nuit.


La première partie du disque prolonge son exploration de la musique française moderne avec deux pièces de Germaine Tailleferre (1892-1983), plus connue que sa collègue Lili Boulanger en raison de sa participation au Groupe des Six, dont elle était le seul membre féminin. L’interprétation toujours juste, puissante et subtile de Kirstin Ihde contraste avec le jeu de la flûtiste, qui sonne un peu trop forcé. Peut-être est-ce dû à une captation très proche d’Erin K. Murphy. L’interprète ne convainc en tout cas pas complètement, ne parvenant pas vraiment à rendre la tranquillité de la “Pastorale”, notamment dans son solo, à force de vibrato. La “Forlane” offre une interprétation déjà plus sobre, et nous entraîne grâce à son rythme dansant.


Là où Murphy semblait parfois mal à l’aise dans les trois premières pièces, elle nous emporte avec bien plus d’assurance dans la sonate de Mel Bonis (1858-1937), développant des graves chauds et généreux. La complicité entre pianiste et flûtiste apparaît dès le premier mouvement, où les deux interprètes échangent dans une écriture très vocale. La vivacité du mouvement rapide laisse cependant de nouveau entrevoir de légères imprécisions de la part de Murphy, qu’on lui pardonne néanmoins immédiatement grâce au mouvement lent de la sonate. L’écriture de Mel Bonis prend en effet toute sa force dramatique dans ce long “Adagio”, magistralement porté par le piano, et nous emmène vers une conclusion tourbillonnante, délicate et joueuse – jeu qui, malheureusement, reste un peu scolaire dans l’interprétation de la flûtiste.


Deux sonates constituent la seconde partie de l’opus, dédiée aux compositrices américaines contemporaines Lita Grier et Nancy Galbraith. La Sonate pour flûte et piano de Lita Grier, composée alors qu’elle n’avait que dix-neuf ans (!), est considérée comme un classique contemporain du répertoire pour flûte. L’écriture, dépouillée et puissante à la fois, alterne entre légèreté « avec esprit », sonorité plus mate et impétuosité : l’enregistrement dévoile une œuvre riche, qui explore toute la palette expressive de la flûte traversière et du piano. L’interprétation des deux instrumentistes se montre sensible et intelligente, et Murphy paraît entrer davantage dans l’univers de ses compatriotes que dans celui de leurs consœurs françaises, malgré la persistance de fragilités techniques (notamment sonores).


Coup de cœur de l’ensemble : la Sonate Atacama, de Nancy Galbraith (née en 1951), et surtout son nocturne, aux doux pianos contrastant avec des rythmes percutants. L’émotion monte dans ce mouvement placé au centre de la sonate, composée en mémoire des victimes de violence politique disparues dans le désert chilien d’Atacama au XXe siècle. L’utilisation de techniques véritablement contemporaines telles que les sons multiphoniques ou le Flatterzunge sert une écriture tout à fait remarquable, dans laquelle le duo flûte-piano s’épanouit pleinement, jusqu’à la course finale du dernier mouvement.


Si le projet entrepris par Erin K. Murphy et Kirstin Ihde pendant leur doctorat à l’université du Wisconsin met au jour plusieurs pépites franco-américaines, il reste trop marqué par le caractère scolaire de l’interprétation, qui souffre de la comparaison directe avec l’album Compositrices à l’aube du XXe siècle, sorti quelques mois plus tôt.


Alice Lacoue-Labarthe



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